mardi, décembre 19, 2006

La problématique de l’école rurale


Il semblerait que les services éducatifs offerts aux enfants des zones rurales sont généralement des services pauvres à tout le moins en comparaison avec ceux que reçoivent les enfants des zones urbaines du même pays.
Cette différentiation semblerait due à plusieurs facteurs : l’offre curriculaire (quantité et qualité), les ressources disponibles, la qualification des enseignants, etc.
• L'offre curriculaire des écoles rurales est généralement conçue à partir des caractéristiques culturelles et les besoins sociaux des groupes dominants. Elle ne signifie rien pour les personnes des secteurs sociaux plus pauvres, dont les différences culturelles ne sont pas considérées. Dans beaucoup de cas, par exemple, on ne respecte pas la langue maternelle des enfants. Cette manière de procéder trouve son origine dans la façon dont on élabore les plans d'études traditionnels de l'enseignement primaire.
• Les secteurs sociaux moins favorisés reçoivent une éducation au moyen de processus et par des enseignants préparés pour répondre aux demandes d'autres secteurs de la société dont ils en font partie.
• Généralement, le sous-financement a comme conséquence que l’éducation qu’on offre en milieu rural:
§ ne peut pas répondre adéquatement aux besoins des élèves et tenir compte des réalités locales;
§ ne peut pas mettre tout en œuvre pour que ces écoles offrent les avantages qui caractérisent les écoles urbaines;
§ ne peut pas adéquatement garder ses écoles en bon état;
§ éprouve de la difficulté à garder son personnel compétent en raison des dures conditions de travail au sein d’un petit conseil scolaire œuvrant dans un milieu minoritaire et du fait que le financement n’est pas disponible pour maintenir un nombre adéquat de ressources humaines;
§ n’est pas à même de se doter du personnel administratif dont il a vraiment besoin.
On doit additionner une autre problématique quand on parle des pays développés : la fermeture des écoles rurales est un problème auquel les communautés et les organisations des enseignants doivent faire face.
« Le débat sur l’école rurale et sur les performances des élèves qui en sont issus est récurrent en France – mais aussi dans de nombreux pays.
Il est fortement lié aux conséquences des mouvements de population entre zones urbaines et rurales, et renvoie à des problématiques d’aménagement du territoire. Plus généralement, il constitue aussi un aspect de la très vaste question de l’égalité des chances scolaires. C’est dire qu’il s’agit d’un sujet particulièrement sensible, dans le champ de la sociologie ou des sciences de l’éducation, mais aussi chez l’ensemble des acteurs directement concernés, et tout particulièrement les acteurs locaux »[i].


· Il y a des autres problématiques lies au changement du milieu rural. Il est admis que la majorité de la population des pays en voie de développement vivra dans des zones rurales[ii] pendant au moins les prochaines vingt-cinq années. Cependant, les conditions de vie vont être affectées et se modifier, sous l’impulsion de la nouvelle réalité mondiale, marquée par la globalisation, l'accroissement des communications, les changements économiques, la disparité des opportunités. L’évolution démographique, les choix de développement et d’aménagement du territoire ont transformé l’espace rural ces vingt dernières années. Dans ce contexte, l’école rurale a évolué, avant tout préoccupée par l’ouverture sur le monde pour rompre avec l’isolement et par la réussite académique du plus grand nombre possible d’élèves. On parle maintenant de «nouvelle ruralité», terme utilisé par l'IICA (Institut Interaméricain de Coopération pour l’Agriculture)[iii], qui tente d'expliquer ces changements qui provoquent surtout un plus grand déséquilibre entre l'offre de services institutionnels et les nécessités des habitants du milieu rural, entre autres en éducation. Quelques aspects méritent d'être soulignés par rapport à cette désarticulation[iv] :
• Les activités productives sont de plus en plus diversifiées en milieu rural: développement du tourisme, croissance des services, accroissement des activités de transformation et de commercialisation liés aux activités agricoles, incorporation au travail d'un nombre croissant des membres de la famille (femmes et jeunes), un plus grand dynamisme de différentes formes d’emploi et de génération de revenus non agricoles.
• Les entreprises agricoles et les petits et moyens producteurs ayant la capacité de moderniser leurs exploitations exigent d’autres types de services, l'accès à l'information et aux technologies qui leur permettent d'accroître leur compétitivité.
• Pluriactivité croissante des familles rurales, plus grande complexité des formes d'obtention des revenus et des besoins nécessaires à une insertion harmonieuse dans les processus de développement rural.
• Pauvreté rurale persistante, migrations croissantes des familles appauvries vers les espaces urbains.
• Relation de plus en plus étroite entre les espaces ruraux et urbains, du point de vue économique et culturel, aspect étroitement lié à la revalorisation du territoire rural comme un espace de dissémination et de recherche d'une meilleure qualité de vie pour la population urbaine.
Tout ce que l’on vient d’énoncer représente les défis auxquels l'école rurale devra faire face pendant les prochaines années dans un contexte de rareté de ressources.

[i] Alpe, Yves (2003) L’OBSERVATOIRE DE L’ÉCOLE RURALE, Une nouvelle approche des scolarités en milieu rural. France. Trouvé en : http://www.cndp.fr/revuevei/134/09011111.pdf

[ii] UNESCO-FAO (2003) Education for rural development: towards new policy responses. Trouvé en: http://unesdoc.unesco.org/images/0013/001329/132994e.pdf

[iii] Gomez, E.S. (2002) La Nueva Ruralidad: ¿Qué tan nueva? Universidad Austral de Chile, Facultad de Filosofia y humanidades. Cité par Bonnen et autres en: “Multifuncionalidad de la agricultura” y “Nueva Ruralidad” ¿Reestructuración de las políticas públicas a la hora de la globalización? Trouvé en: http://www.ftierra.org/ftierra1104/docstrabajo/pmboscfr_nr.pdf


[iv] Mora Alfaro, Jorge (2004) POLÍTICA AGRARIA Y DESARROLLO RURAL EN COSTA RICA:
Elementos para su definición en el nuevo entorno internacional, Fundación Fiedrich Ebert, San José,
Trouvé en: http://www.redesma.org/boletin/bol_2004/bol_6_6/politica.pdf

Les résultats de l'école rurale


À partir des informations précédentes, on pourrait être porté à croire que les conditions de l’école en milieu rural sont telles que l’éducation ne peut qu’aboutir à un constat d’échec. Les résultats ne sont cependant pas aussi mauvais que ce à quoi l’on aurait pu s’attendre.
La réussite scolaire
Malgré les caractéristiques semblables des écoles rurales de par le monde, il y a de grandes différences entre les pays développés et ceux en voie de développement. Différents travaux réalisés par l’Observatoire de l’École Rurale en France, montrent que :
« L'école rurale bénéficie en apparence de moyens plus importants que l'école urbaine parce que le nombre d'élèves par maître y est plus faible. En réalité lorsqu'elle est située en zone fragile, elle est souvent pénalisée par son isolement, la rareté de l'offre culturelle et sportive et par son retard dans l'offre d'écoles maternelles. Cependant en zone rurale, là où les classes à plusieurs cours sont majoritaires, les résultats des élèves dans les savoirs de base sont identiques voire légèrement supérieurs à la moyenne nationale. »[i]
Dans un rapport publié en septembre 1992, la Direction de la recherche du ministère de l'Éducation du Québec décrit une typologie des écoles primaires a partir de deux paramètres, leur taille et la présence de classes multiprogrammes, et évalue leur impact sur la réussite scolaire des élèves. Les chercheurs mentionnent que :
« ...les pourcentages des doubleurs sont légèrement supérieurs dans les petites, dans les moyennes - petites ou dans les moyennes écoles. Par ailleurs, lorsque l'on compare les écoles de même taille avec ou sans classes multiprogrammes, on observe que les pourcentages des doubleurs sont légèrement inférieurs dans les écoles ayant des classes multiprogrammes »[ii].
Ces résultats positifs sont renforcés par une étude française[iii] :
Le taux de réussite aux tests est globalement plutôt meilleur dans les milieux ruraux et il s'accroît significativement dans les petites structures à plusieurs niveaux :

Nombre de classes et de niveaux Scores/français Scores/mathématiques
Écoles de moins de 4 classes 64,4 69,0
Écoles de plus de 3 classes 62,4 66,5
- classes à 2 niveaux 63,7 68,3
- classes à 4 niveaux 64,1 68,9
- classes à 5 niveaux 65,9 72,8
Ensemble des écoles rurales 63,1 67,4
Ensemble des écoles urbaines 63,2 67,3

Scores des élèves des écoles rurales aux tests d'évaluation selon le nombre de niveaux dans la classe qu'ils fréquentent (Résultats nationaux, année 1993-94 -DEP)

Bien sûr, il faut tout au moins nuancer la portée des résultats de ses études, par exemple, rien qu’en France, la scolarité est obligatoire et respectée à la lettre, la pauvreté malgré tout est moins grande qu’ailleurs etc. Ce qui n’est pas le cas dans la plupart des pays en voie de développement.
La migration
Les études sur la migration rural-urbaine prenant en compte le niveau de scolarité montrent que les élèves les plus scolarisés ont une tendance plus grande à la mobilité. On retrouve cette tendance au Canada, aux États-Unis et en Europe.[iv]
Le passage au niveau secondaire.
On constate dans bien des pays que le passage du niveau primaire au niveau secondaire pose plus de difficultés aux élèves des milieux ruraux qu’à ceux des plus grandes agglomérations. Cette difficulté s’expliquerait par[v] :
§ la disparition de l'effet « grand frère » (on apprend avec des élèves d'âges différents);
§ des groupes plus nombreux et une plus grande homogénéité scolaire;
§ des pratiques d'autonomie non valorisées au secondaire;
§ une diminution des activité éducatives (sorties de proximité remplacées par des sorties linguistiques, par exemple);
§ un moins grand attachement au lieu de vie;
§ une baisse des pratiques culturelles dans le cadre scolaire
On ne sait toujours pas pourquoi les élèves, qui malgré toutes les difficultés, réussissent à finir relativement bien au primaire, perdent-ils cet avantage au secondaire.


[i] L'avenir du système éducatif en milieu rural isolé. Bulletin Official de l'Éducation Nationale N°48 du 24 décembre. France. Trouvé en : http://www.education.gouv.fr/botexte/bo981224/SCOE9803197C.htm
[ii] Ministère de l'Éducation, Direction de la recherche, Rapport d'étude sur les écoles primaires et les classes multiprogrammes, Québec, (1992), p. 20. Cité par Thibault-Belangé, Annette (1993) La Petite école et la classe multiprogramme, des réalités incontournables. Article dans Education Canada. Toronto: Winter 1993. Vol. 33, N° 4; pg. 16

[iii] Alpe, Yves (2002). Modèles culturels des acteurs, stratégies scolaires et conditions de l'étude dans l'école rurale. Présentation au Troisième colloque international "Recherche et formation des enseignants"
IUFM de l'Académie d'Aix Marseille,14, 15 et 16 février 2000. Trouvé en :
http://www.grenoble.iufm.fr/rural/publication/colloREF.doc


[iv] LeBlanc, Patricia (2002) La migration des jeunes de milieu rural. Institut National de la recherche Scientifique. Canada. Trouvé en : http://www.inrs-ucs.uquebec.ca/pdf/rap2002_04.pdf

[v] Snuipp’89 (2005) École et ruralité : Le SNUipp décape des fausses évidences. Article de journal en SNUIPP’89. France. Trouvé en : http://89.snuipp.fr/article.php3?id_article=403&var_recherche=communaut%E9

L’enseignant d’école rurale


Les enseignants ne constituent pas une catégorie homogène d’individus. Par exemple, aux États Unis, on retrouve en milieu rural les enseignants les plus jeunes, les moins scolarisés et les moins expérimentés. Ils appartiennent plus qu’en milieu urbain à une minorité ethnique.[i]
Leur formation.
Dans la plupart des pays, la formation des enseignants des écoles rurales est identique à celle de leurs collègues des écoles urbaines. Pour les enseignants de l’école rurale cette formation universelle s’avère inappropriée puisqu’elle n’aborde pas les problématiques spécifiques à la pédagogie multiniveaux. Très peu de pays offrent ce type de formation à leurs futurs enseignants.
De plus, comme c’est le cas dans la plupart des pays en voie de développement, un grand nombre de futurs professeurs sont formés dans des écoles privées sans supervision de l’État : il arrive alors parfois que les programmes de formation ne répondent pas aux normes établies.
Par ailleurs, comme il y a pénurie d’enseignants, les écoles rurales doivent se contenter souvent de jeunes stagiaires ou d’étudiants de secondaire très enthousiastes, mais sans formation adéquate pour occuper ces postes.
Les enseignants en milieu rural possèdent généralement les connaissances de base pour remplir leur fonction, mais possèdent rarement la connaissance du milieu où ils vont l’exercer : il semblerait que ce soit là la plus grande lacune du système de formation.
Nous n’avons trouvé que trois initiatives de formation spécialisée des enseignants d’écoles rurales.
§ L’Université Nationale du Costa Rica travaille sur ce sujet depuis 25 ans.
§ Le projet MUSE (Multiniveaux School Education) de la Communauté Européenne. Le projet repose sur une collaboration étroite entre les concepteurs et les experts pédagogiques, les professeurs et les décideurs. Il vise à augmenter les qualifications professionnelles des instituteurs multiniveaux ainsi qu’à développer leurs capacités d’employer la technologie de l'information et des communications (TIC) comme outil de support dans leur enseignement quotidien. Il fournira aux instituteurs multiniveaux de toute l’Europe la formation et l'appui continus, facilitera la communication entre eux et la communauté éducative.
§ La troisième initiative corresponde à l’université pédagogique de la Colombie.
Dans ces trois cas, les organismes responsables de la formation reconnaissent les particularités du travail éducatif dans les zones rurales.
Mais, ce ne sont là que des initiatives relativement restreintes et localisées, et il est généralement admis que les enseignants n’ont pas une formation adéquate leur permettant de faire face de façon efficace au travail exigé par l’école rurale.

Leurs conditions de travail :

Il est reconnu, presque unanimement, que les professeurs travaillant dans des écoles multiniveaux, situées dans les zones éloignées sont, de ce fait, pénalisés sur le plan personnel et professionnel.

Le salaire : il n'y a habituellement aucune incitation financière associée au travail dans les écoles multiniveaux des zones éloignées. La rémunération des enseignants y est identique à celle des instituteurs œuvrant en milieu urbain.
Le logement : les conditions d’hébergement sont insatisfaisantes, d’autant plus si l’enseignant est marié et a des enfants.
La dépendance : l’enseignement en zone éloignée nuit à la satisfaction des besoins de la famille en limitant souvent l’accès à l’emploi du conjoint et en offrant des choix limités aux études pour les enfants du couple.
La promotion : possibilité restreinte de promotion professionnelle pour les enseignants.
L’isolement professionnel : les occasions de se réunir, d’échanger avec des collègues ou de participer à des activités professionnelles sont forts limitées.
La supervision : beaucoup de systèmes nationaux n’assurent pas une supervision des écoles rurales. Lorsqu’on le fait, on vise plus à punir des fautes disciplinaires qu’à évaluer la qualité des services et de l’enseignement
Leurs rôles.
L’enseignant d’école rurale joue une grande variété des rôles qui, en zone urbaine, sont assumés par différents type de personnel ou par des organismes autres que l’école :[ii]
Rôle d’instituteur
La fonction principale de l’enseignant d’école rurale est de dispenser la formation fondamentale : acquisition des connaissances, développement des habilités, transmission des valeurs et développement des attitudes souhaitables.
On attend de l’enseignant qu’il soit souple et qu’il utilise différentes stratégies pour faire de l’apprentissage un processus significatif et efficace.

Rôle de facilitateur
L’enseignant devrait pouvoir comprendre les différences entre les élèves, pouvoir les motiver dans leur apprentissage et les guider à travers leurs matériaux d'étude.

Il devrait aussi être un transmetteur de la connaissance, un facilitateur dans le processus d’apprentissage. Ces fonctions «normales» sont plus difficiles à remplir en milieu rural, à cause de la présence des différents niveaux et, parfois, de la multiplicité des programmes d’études.


Rôle de personne- ressource en liaison avec la communauté
Dans bien des situations, les enseignants d’écoles rurales, en raison de leur formation et leur fonction, occupent une place importante dans la communauté locale. C'est le cas, non seulement aux yeux des élèves, mais également de ceux de leurs parents. Ainsi, l‘enseignant est le lien critique entre l'école et sa communauté. L’enseignant d’école rurale est souvent la personne la plus instruite de la communauté et en tant que telle, il joue un rôle important comme conseiller auprès des élèves et de leurs familles. L’enseignant peut être vu comme un modèle, son rôle est fortement respecté et ses conseils sont fortement recherchés et appréciés.

Rôle de planificateur
La planification est une fonction critique pour l’enseignant d’école rurale. Une planification appropriée a comme conséquence une augmentation de la réussite des élèves. Cette fonction est plus complexe à exercer en milieu rural qu’en milieu urbain : la planification dans les écoles rurales doit prévoir les activités de chacun des élèves à travers un certain nombre de niveaux d’enseignement. Pour chaque niveau dont il a la responsabilité, l’enseignant doit répondre aux questions suivantes :
-À qui j'enseigne?
- Qu’est-ce que j’enseigne?
- Comment je l'enseigne?
- Quand je l'enseigne?
- Pourquoi je l’enseigne?
Ensuite, il doit concevoir un plan de réalisation afin d'atteindre les objectifs de la leçon. Les stratégies de réalisation incluent la planification des leçons, le choix des activités, le temps de celles-ci, etc. Tous ces éléments font partie d’une démarche systémique, complexifiée par la multiplicité des niveaux.



Rôle d’évaluateur
Un des rôles qu'un enseignant multiniveaux doit effectuer est de superviser le progrès de l’élève, afin d'assurer la qualité de l'éducation. Habituellement, ceci exige des enseignants de déterminer les degrés de connaissances des élèves à l’arrivée, en cours d’année et à la fin de chaque année scolaire. Par conséquent, l'évaluation devrait être considérée comme une partie continue et intégrale du processus d'enseignement.

Rôle de concepteur de matériel didactique
Bien que le matériel didactique dédié à chacun des programmes d'études soit habituellement préparé par les autorités centrales d'éducation, l’enseignant d’écoles rurales doit toujours développer son propre matériel additionnel, afin de satisfaire les besoins concrets de l'enseignement multiniveaux tenant compte du contexte local :
-concevoir et réaliser des fiches individuelles de travail, pour sauver du temps dans la salle de classe et pour maximiser le temps d’étude des élèves;
-mettre à contribution l’environnement immédiat et les ressources locales, et encourager les élèves à produire du matériel;
-concevoir les cahiers de travail qui conviennent aux élèves et tenant compte du contexte et des conditions de la région;
-inclure dans ce matériel les activités et connaissances importantes pour la culture locale.

Rôle d’entraîneur paraprofessionnel
Ce rôle de soutien exige de la part de l’enseignant le sens de l’organisation et fait appel à sa créativité : ses rapports avec les parents et les membres de la communauté doivent être harmonieux, afin que ces derniers puissent accompagner les élèves dans leurs études.
L’enseignant peut également former des parents pour aider leurs enfants à faire les devoirs à la maison.
Il arrive parfois que l’enseignant se fasse aider en classe par les membres de la communauté et les parents les plus aptes. Il doit les former afin de tirer le maximum d’avantages de leur intervention.

Rôle de représentant gouvernemental
En raison de son statut social et de son niveau d’éducation, l’enseignant d’école rurale jouit habituellement d’un certain prestige et de ce fait est considéré par la communauté comme une source importante d’information sur différents sujets. Ainsi, les membres de la communauté se rendent souvent à l'école ou à la maison de l’enseignant pour discuter des sujets éducatifs ou non. D’un autre côté, le gouvernement utilise l’enseignant pour diffuser dans les zones éloignées ses grandes orientations ou faire appliquer ses politiques, plus particulièrement dans le domaine de la planification de la santé des familles.

Rôle de chercheur
Les enseignants ne sont pas habituellement formés pour être des chercheurs en éducation, leur principale charge de travail étant l’enseignement.
En milieu urbain, cette «non formation» ne pose pas de problème puisque ce rôle est dévolu aux universitaires ou aux éducateurs spécialisés. Cependant, dans les écoles rurales, ces ressources humaines ne sont pas facilement accessibles ou disponibles. Par conséquent, l’enseignant assume souvent cette fonction de recherche-action, en se posant des questions auxquelles il doit seul trouver réponse.
+ Quel est le matériel didactique le mieux approprié à son enseignement et répondant aux besoins locaux?
+ Comment augmenter le taux d'inscription et réduire le taux d’échec ?
+ Quels sont les types de loisirs et de sports que doit offrir l’école?
+ Quelles activités extracurriculaires doit-on mettre de l’avant et à quel moment?
+ Pourquoi certains élèves n’apprennent-ils pas comme on peut s’y attendre normalement?

Rôle de contrôleur de qualité
La responsabilité des gouvernements nationaux est de rendre accessible l’éducation au plus grand nombre possible d’habitants. Dans plusieurs pays, il est difficile d’atteindre cet objectif, plus particulièrement où :
une partie de la population vit dans des régions éloignés et quasi inaccessibles,
subsistent des groupes minoritaires parlant différentes langues ou dialectes,
subsistent des communautés menant un style de vie nomade.

Comme cet objectif quantitatif d'éducation pour tous semble se concrétiser de plus en plus, les gouvernements orientent maintenant leurs efforts vers l’étape subséquente, c’est-à-dire la rechercher de la qualité de l'éducation. Dans cette perspective, il ne suffit plus qu’un enseignant d’école rurale se contente simplement de dispenser son enseignement. Il doit en outre s'assurer que le processus d’enseignement et d’apprentissage est de haute qualité.

Rôle de parent « suppléant»
Dans les communautés éloignées, en particulier là où l’enseignant parle la langue locale et où il est bien accepté par la communauté, se créent souvent entre l’enseignant et ses élèves des rapports plus étroits que ceux qu’on retrouve dans les écoles urbaines. L'atmosphère d’une salle de classe multiniveaux d’une école rurale ressemble à celle d’une maison, puisque tous les élèves se trouvent dans le même local. L’enseignant est alors souvent perçu comme parent de remplacement de divers élèves. Ainsi, les relations de l’enseignant avec les élèves se font sur la base de ce rapport (parent de remplacement) plutôt que sur la base du rapport plus formel d'enseignant-élève. Par exemple, l’enseignant peut aider les élèves à être ordonnés et propres, à faire le marché, à faire ses devoirs, etc. Il peut aussi, et surtout, les persuader de fréquenter l’école avec assiduité.

Rôle de directeur financier
Dans les communautés éloignées et petites, l'école peut être la plus grande entité de la communauté et son enseignant est souvent appelé à y tenir le rôle de directeur des finances.
Il s’occupe alors de
- la perception d'argent de la communauté pour des réparations mineures et d'entretien de bâtiments scolaires;
- la perception d'argent des élèves pour l'achat des matériaux de sports et des jeux;
- la distribution de l'argent pour l'organisation des voyages d’études;
- la trésorerie de l'école et de la communauté.


Rôle de représentant de la culture, des valeurs religieuses ou politiques
Bien que non liées à sa fonction principale, l’enseignement, certaines activités communautaires sont par la force des choses dévolues à l’enseignant «érudit». Souvent, il
§ organise des foires, festivals, fêtes nationales ou religieuses,
§ dirige le chant, les activités dansantes ou autres de la communauté,
§ agit en tant que prédicateur religieux,
§ dirige les prières funèbres,
§ aide le gouvernement dans la tenue des élections, du recensement de la population, etc.

[i] National Education Asociation (1998) “Status of Public Education in Rural Areas and Small Towns — A Comparative Analysis”. Trouvé en: http://www.nea.org/rural/companal-rural.html

[ii] Birch, Ian and Mark Lally (1995) Multiniveaux teaching in primary schools. Centre of research in rural education. University of Western Australia.

caractéristiques générales de l’école rurale


Les écoles rurales possèdent leurs propres caractéristiques, qu’elles soient d’ordre pédagogique ou administratif, qui les différencient nettement des écoles urbaines.
Caractéristiques d’ordre pédagogique
Les méthodes ou approches pédagogiques utilisées dans ces écoles sont particulières :
La classe unique.
La «classe unique » a depuis toujours été l’apanage des écoles rurales : un seul enseignant s’occupe de tous les enfants d'âge scolaire et préscolaire habitant dans la région. Le fonctionnement d'une classe unique est assez particulier, puisqu'il requiert la détermination d'objectifs d'apprentissage de manière indépendante pour chacun des enfants, mais dont la poursuite dans la classe doit avoir lieu de manière simultanée.
L’enseignement multiniveaux.
On qualifie de multiniveaux l’enseignement dispensé à des élèves de différents âges présents en même temps dans le même local de classe. Cette structure multiniveaux, que l’on retrouve souvent en milieu rural, est connue sous divers noms selon les pays : classes composées ou classes combinées, classes doubles, classes multiâge, classes verticalement groupées, classes multiples, famille classe ou classes à multiniveaux.
Mulcahy[i] décrit le caractère unique des classes multiniveaux de la manière suivante:
1. Des élèves de plus d'un niveau sont regroupés dans une même salle.
2. L’enseignant doit bien maîtriser les programmes d’études de plusieurs niveaux.
3. La gamme d'âge des élèves est plus large que dans une classe à un seul niveau.
4. Pour des raisons pratiques, le niveau moyen d’enseignement se rapproche du plus bas dénominateur commun des capacités des élèves.
5. Les élèves restent dans la même salle pendant au moins deux années.
6. Les élèves ont le même enseignant pendant au moins deux années.
7. La promotion des élèves d’un niveau à l’autre est également spéciale. Selon leurs situations individuelles, des élèves passent au niveau supérieur tout en conservant le même enseignant et la même salle ou changent de classe et d’enseignant.

Cette méthodologie est une réalité dans l'éducation primaire de beaucoup de régions. Elle constitue une forme éducative très courante dans des secteurs ruraux, problématiques ou non, dans des régions et des secteurs urbains peu habités et où les conditions sociales sont souvent défavorables. Dans de tels secteurs, les écoles multiniveaux visent à :
- rendre accessible aux jeunes l’éducation et à leur donner de l’assistance continue dans un environnement scolaire;
- fournir également la connaissance et l’appropriation des valeurs souhaitables;
- jouer un rôle plus large dans le développement social.

Mais malheureusement, dans la réalité, les écoles multiniveaux sont souvent négligées par le système d'éducation. La plupart du temps, les autorités éducatives nationales, les ministères de l'éducation et les établissements pédagogiques, ne tiennent pas compte de la différentiation des conditions d'enseignement et d'apprentissage qui prévalent dans l'environnement multiniveaux ou ne la considèrent pas importante. La formation multiniveaux est souvent considérée comme un mal nécessaire adopté juste pour respecter l'engagement officiel de l'État de fournir l'éducation à tous. L’État accorde peu d'attention pour dispenser une éducation de qualité ou pour soutenir les besoins spécifiques des enseignants travaillant dans les écoles multiniveaux. En raison des singularités géographiques, des particularités socio-économiques et du manque d'infrastructure et de personnel, ces écoles restent toujours retardées.
Caractéristiques d’ordre administratif
Les ressources.

L'infrastructure scolaire est déficiente dans beaucoup d'écoles à travers le monde. Les bâtiments sont vieux et ne sont pas entretenus régulièrement, les meubles ne sont pas remplacés souvent, les travaux de réparation ne sont pas effectués de manière systématique. Dans presque la moitié des écoles rurales des États-Unis, par exemple, le câblage électrique nécessaire au soutien de la technologie est déficient ou tout simplement absent. 84 % d’entre elles ne possèdent pas de fibre optique ni de réseaux d’ordinateurs très importants pour mettre en application le programme national «no child left behind ». De «vieux bâtiments» (plus de 50 ans), peu ou mal entretenus faute d’argent, accueillent près de la moitié (46 %) des élèves des milieux ruraux.[ii].

Des salles de cours partiellement équipées se retrouvent encore de nos jours. Il arrive souvent que des élèves suivent leurs cours assis sur le plancher et certaines écoles manquent d’installations sanitaires et d'eau.

Par ailleurs, la stratégie multiniveaux implique l’élaboration, la reproduction et la distribution de quantités importantes de matériel d’auto-apprentissage, pour soutenir l’apprentissage individuel, l’apprentissage par les pairs et en petits groupes : souvent, ce matériel est inexistant.

Les relations avec la communauté.
On a vu précédemment qu’était dévolu à l’école le rôle d’agent mobilisateur de la communauté. C’est là que se discutent ou se résolvent les problèmes immédiats : l’école, par exemple, centralise et coordonne les efforts des habitants face à des problèmes de santé publique, de productions agricoles ou, plus simplement, de relations entre voisins.
Pour sa part, la communauté soutient en retour l'école dans la collecte de fonds. Elle est continuellement sollicitée à contribuer financièrement pour soutenir les déplacements dans les champs, les activités sportives, etc.
Ce lien fort entre la communauté et l'école est mis de l’avant par Roach qui, pour sa part, se réfère à différents auteurs[iii] :
« En ce qui concerne la communauté, Hutto fait écho à l'idée que les petites écoles apportent un sens d'identité aux communautés, ce qui alternativement stimule un sens d'identité et d'appartenance chez les élèves. Des parents sont souvent impliqués dans des activités de l’école et intéressés aux progrès des élèves. En conséquence l'école reçoit souvent le soutien de la communauté aux activités curriculaires supplémentaires ».

Ces liens avec la communauté sont évidents quand vous voyez les gradués faire des visites régulières à l'école quand ils reviennent séjourner chez leurs parents. Ils s’identifient avec l’école.

[i] Mulcahy, D. (1996) “Why rural education?” Cité par Roach, Lorne (2000) “Aspects affecting small rural schools”. Faculty of Education. Memorial University of Newfoundland. Thesis for Master Degree. Canada.

[ii] McColl, Ann and Malhoit, Gregory C. (2004) Rural School Facilities: State Policies that Provide Students with an Environment to Promote Learning. Rural School and Community Trust. USA. Trouvé en: http://www.ruraledu.org/docs/rural_school_facilities_policies.pdf

[iii] Roach, Lorne (2000) “Aspects affecting small rural schools”. Faculty of Education. Memorial University of Newfoundland. Partie de sa Thèse for Master Degree. Canada.

lundi, décembre 18, 2006

: Dollars & Sense: The Cost Effectiveness of Small Schools. Les Dollars et le sens commun : La rentabilité des petites écoles.

Identification de la source
Le rapport « Les dollars et le sens commun » résulte de la collaboration de trois institutions américaines : la fondation KnowledgeWorks, le Rural School and Community Trust et Concordia, Inc. Il a été mené par une équipe de neuf chercheurs spécialisés en éducation, en architecture et en recherche qualitative.
Les auteurs en sont Barbara Kent Lawrence, Ed. D. Steven Bingler, Barbara M. Diamond, J. D. Bobbie Hill, Jerry L. Hoffman, Craig B. Howley, Ed. D. Stacy Mitchell, David Rudolph, Ed. D. et Elliot Washor.

Résumé des idées principales
Cet article traite des avantages éducatifs et sociaux des petites écoles et des effets négatifs des grandes écoles sur les étudiants, les professeurs et les membres de la communauté, aussi bien que les désavantages économiques inhérentes aux grandes écoles.
Ils ont tenté de démystifier la croyance généralement répandue que la construction et le fonctionnement des grandes écoles sont moins chères que celles des petites. Leur conclusion : l'investissement de l’argent provenant des impôts dans de petites écoles semble avoir du bon sens.
Les auteurs constatent qu’aux États Unis, depuis plusieurs années, les districts scolaires ferment de plus en plus de petites écoles, sous prétexte que les grandes écoles coûtent moins cher que les petites. Beaucoup croient que le rapport coût/bénéfice joue en faveur des grandes unités.
Selon les auteurs, les districts scolaires bâtissent de grandes écoles pour répondre aux contraintes qui leur sont imposées par l’État : nombre minimal d’élèves par école relativement élevé, norme de superficie à respecter par élève, etc.
La situation semble toutefois changer. Quelques États, comme la Floride, le Maryland et le Vermont, exemples choisis par les auteurs, commencent à remettre en question leurs mesures normatives et parlent de privilégier la construction de petites écoles, espérant ainsi venir à bout des problèmes de discipline, diminuer la criminalité, éliminer les «gangs», abaisser les taux de décrochage scolaire.
S’appuyant sur des recherches antérieures, les auteurs définissent ce qu’ils entendent par «petite école» :
École de 2e cycle du secondaire (grades 9-12) : au plus 75 étudiants par niveau (300 au total).
École de 1er cycle du secondaire (grades 5-8) : au plus 50 étudiants par niveau (200 au total).
École primaire (grades 1-8) : au plus 25 étudiants par niveau (200 au total)
École primaire (grades 1-6) : au plus 25 étudiants par niveau (150 au total)
Selon les auteurs, plusieurs recherches ont déjà montré les avantages des petites écoles. Le taux de diplômation y est plus élevé que dans les écoles plus grandes, celui du décrochage plus bas, on y rapporte moins d’incidents violents, moins de vandalisme et le sentiment d’appartenance y est plus élevé. Les élèves des petites écoles participent plus aux activités extracurriculaires et la satisfaction des enseignants est plus élevée. Les membres de la communauté et les parents y sont plus engagés (Coton, 2001).
La taille des écoles influence plus la performance des étudiants que le nombre d’élèves par classe ou la race, à cause essentiellement de l’ambiance qui y règne.
Pour prouver que l’investissement dans des petites écoles a du bon sens et est rentable, les auteurs se sont appuyés sur les données des budgets de 128 écoles secondaires de 1995-1996 recensées dans une recherche effectuée au New York University’s Institute of Education. Le coût par année et par élève dans une école de moins de 600 individus dépasse de 1410 $ celui observé dans une école de plus de 2000 élèves. Par contre, en divisant les coûts totaux par le nombre de diplômés plutôt que par le nombre d’élèves, les auteurs constatent et affirment qu’il est plus sage d’investir dans de petites écoles. Le taux de décrochage plus élevé dans les écoles plus grandes explique ce résultat.
En plus, si l’on tient compte des coûts indirects associés au décrochage (par exemple, productivité au travail moins élevée, l’assistance sociale dédiée aux décrocheurs, la tendance à la criminalité et les coûts des services sociaux qu’elle engendre), l’investissement est plus élevé dans les grandes écoles que dans les petites.
Il semblerait aussi que les écoles plus grandes aient besoin de personnel supplémentaire pour l’entretien et l’administration, par exemple, on prévoit dans les grandes écoles un orienteur par 250 étudiants, alors que bien souvent ce sont les enseignants et le directeur de la petite école qui règlent les problèmes des élèves qu’ils connaissent très bien. À ces arguments, on peut ajouter une économie non négligeable en coûts de transport. Les élèves se rendent généralement à pied ou à bicyclette dans leur petite école relativement proche de chez eux. Cette situation présente aussi l’avantage de favoriser l’activité physique et de gagner du temps, que l’on peut consacrer à des activités familiales, par exemple.
Finalement, les auteurs rappellent qu’on doit aussi penser aux coûts sociaux associés à la fermeture des petites écoles. Fermer une école engendre souvent un ralentissement de l’économie locale, une perte de cohésion et une diminution de participation à la vie communautaire.

Méthodologie
Exploitant des données tirées de 489 projets de construction d’écoles, entre 1990 et 2001, et pouvant accueillir entre 24 et 4000 élèves,, les auteurs ont pu décortiquer les coûts de construction par groupes d’écoles (les petites et les plus grandes) et par niveau d’enseignement : élémentaire, premier cycle de secondaire et deuxième cycle de secondaire. Les auteurs ont calculé à combien revenait le pied carré de construction d’une école par élève. Les petites écoles sont 20% plus chères que les grandes. Mais, si l’on compare le coût des petites écoles avec la moyenne de toutes les écoles (pas seulement les grandes), la différence n’est plus que de 5%. Les auteurs ont aussi constaté qu’il coûtait moins cher au pied carré de construire une petite école qu’une école de taille moyenne.
Conclusion :
Les auteurs affirment que les petites écoles sont un investissement rentable en termes non seulement économiques mais aussi en termes de bien-être des élèves, des communautés et des pays.

Réflexion Critique
La justification du sujet de cette recherché est claire, pratique et bien énoncée : il s’agit de persuader les décideurs de construire des petites écoles plutôt que des grandes. Les arguments utilisés pour le faire sont bien fondés et reposent sur des données officielles et récentes.
Les chercheurs ont fait une bonne recension des écrits incluant les dernières tendances vers la construction de petites écoles.
À mon avis, le fait d’avoir utilisé dans l’évaluation des coûts par élève, non pas le nombre d’élèves, mais le nombre de diplômés, constitue un apport important. Par contre, la détermination des limites pour les petites écoles (quantité d’élèves/niveau/école) semble être un peu arbitraire, même si les nombres avancés font du sens.
On trouve dans Internet 143 références à cet article. Aucune d’entre elles ne comporte de critiques négatives sur la méthodologie ou sur les résultats. Au contraire même, les articles en général le trouvent positif. La même équipe de recherche a publié un deuxième rapport « Les Dollars et le sens commun II », qui formule des recommandations bien précises pour la construction des petites écoles.

qu’est-ce que l’école rurale?

Ce travail porte spécifiquement sur l'école de niveau primaire située en milieu rural. On définit généralement cette institution, connue sous divers noms dans différentes régions du monde (école rurale, école de village, école de rang), en fonction de sa localisation physique. On trouve aussi dans la littérature quelques tentatives de la définir en fonction de la tâche qu'elle remplit. En tenant compte de quelques considérations importantes, on parle alors d'«école de proximité» française, d’«école active» colombienne et d’«'école communautaire» mexicaine[i].
Dans ce second cas, comme l'emphase est mise sur la fonction et non pas sur la situation géographique, on peut aussi trouver ce même modèle dans les secteurs urbains. Toutefois, ces concepts ont été développés en principe pour s'occuper des tâches éducatives des zones les plus éloignées des centres très peuplés.
Indépendamment de ces considérations, lorsque nous parlons d’école rurale, il faut comprendre que nous référons à «la petite école», généralement perdue dans la campagne, s'occupant avec plus ou moins de succès des nécessités non seulement des enfants de la région mais aussi des adultes, dont l'infrastructure est minimale et dont l’aménagement est entre les mains des habitants de la région et, dans la plupart des cas, des enseignants.
La ruralité.
Pour bien situer ce type d’école, il est important de définir ce que l’on entend par «rural». L’adjectif « rural » est utilisé en opposition à «urbain» : le milieu rural est celui qui se trouve éloigné des centres urbains, il peut être plus ou moins plus ou moins vaste et ses logements sont dispersés. Bien qu'il n'existe pas de consensus clair sur le concept de la ruralité, on peut cependant la définir à partir d’éléments caractéristiques communs largement acceptés. Une basse densité démographique distingue au premier chef une zone rurale d’une zone urbaine (pour le gouvernement américain, moins de 2 500 habitants[ii], pour l’UNESCO/FAO[iii], entre 5 000 et 10 000; pour Statistiques Canada, moins de 5.000[iv]). D’autres éléments, tels que la pauvreté de l’infrastructure (logements et institutions), la prédominance de l'agriculture comme principale activité économique (bien que cette condition ait changé dans bien des cas), le coût du transport des personnes, des biens et des produits, ceux-ci généralement manufacturés dans des centres plus peuplés situés à des distances plus ou moins grandes.
En termes d’éducation, il est aussi important d'indiquer qu'il existe une différenciation culturelle dérivée de la condition de vie rurale. Les personnes habitant les zones rurales ont préservé des spécificités quant à leur langue régionale (en incluant les accents différenciés), leurs goûts, leurs comportements collectifs et individuels, leurs cosmovisions particulières. Quatre traits culturels caractéristiques différentient les jeunes ruraux des jeunes des zones urbaines en Amérique Latine[v] : une relation plus proche et plus précoce avec le monde du travail, une socialisation difficile à cause de l’isolement et de la famille qui joue un rôle fondamental, un passage plus court entre l’enfance et l’âge adulte et, finalement, une difficile auto-identification en tant que jeunes.
Par ailleurs, il faut considérer que les populations indigènes ont généralement occupé des territoires ruraux. C’est à cause de cela qu’il existe une étroite association entre les tâches propres de l'école rurale et de l'école indigène.
L’école rurale : ressource universelle.
Dans un monde où 70 % des êtres humains pauvres habitent dans les zones rurales, il est logique que soient apparus, à différents moments de l'histoire, des réponses visant à améliorer le développement des habitants des petites communautés rurales. Ainsi, on remarque que l’Église catholique et les Églises d’autres appartenances ont participé, de façon importante, à l’établissement des petites écoles en Europe, au Canada et aux États-Unis. Le Musée de l’école rurale en Bretagne (France) nous raconte l’histoire de l’école depuis 1907. Il est un des nombreux musées que la France a créés dans des écoles fermées. Le projet « Communauté de Recherche Interdisciplinaire sur l'Éducation et l'Enfance » (CRIEE) [vi] en Suisse, a récupéré des documents dans une collection qui s’appelle «l'école Privat » (1814-1960). Au Canada, le journal «L’école rurale» a été publié de septembre 1904 à juin 1905 avec les objectifs suivantes : développer chez les enfants des campagnes l'amour de la terre et faire en sorte que l'école les encourage à embrasser la profession de leur père. Dans les articles signés par Magnan, on retrouve toutes ses convictions dans un discours fortement teinté de propagande, qui valorise la terre, l'amour du travail, la foi, la patrie, la famille, le passé et les traditions[vii]
Le texte suivant donne une image claire de ce qu’est devenue l’école rurale du Québec[viii].
« Pendant de nombreuses années, les écoles de rang ont meublé le paysage rural québécois. Pour plusieurs personnes, les écoles de rang représentent le seul lieu d'instruction qu'ils ont connu.
Le Gouvernement du Québec a reconnu l'importance de cette institution en classant l'École du Rang II d'Authier monument historique en 1981. Cette école de l'Abitibi, bien représentative de toutes les écoles de rang, a ouvert ses portes en 1937 pour accueillir les élèves des rangs II et III d'Authier. En 1958, elle ferme ses portes .Les enfants du rang iront au village d'Authier pour s'instruire. C'est le phénomène de la centralisation. Jusqu'en 1981, cette bâtisse sera un hangar de ferme. À cette date, des gens décident de lui donner une autre vocation, d'en faire un centre d'interprétation de l'histoire scolaire rurale du Québec.
Depuis 1983, l'École du Rang II d'Authier accueille des gens désireux d'en savoir plus sur ce sujet.
La collection imposante de livres anciens, le matériel pédagogique utilisé autrefois et l'environnement physique nous transportent facilement dans les années quarante.
Il est facile de saisir l'ambiance qui pouvait y régner quand Monsieur le curé et/ou Monsieur l'inspecteur venaient rencontrer l'institutrice et ses élèves.
C'est un voyage dans le temps qui nous permet d'apprécier le présent ».

Dans le tiers-monde, les écoles rurales sont apparues plus tardivement. Au début des années soixante-dix, plusieurs pays en voie de développement ont reçu de l'argent de la Banque Mondiale dans le but d'adapter et d’améliorer l'éducation qui était dispensée dans les zones rurales (Rwanda, Malawi, Éthiopie)[ix]. En Amérique Latine, plusieurs écoles rurales ont ouvert leurs portes dans les années 70 grâce au programme «Alliance pour le progrès», sorte de «plan Marshall» version continentale annoncé en mars 1961 par le président John F. Kennedy. Ce programme impliquait le transfert à l'Amérique latine de 20 milliards de dollars comme aide au développement.
Comme la situation démographique des pays du tiers-monde est diamétralement opposée à celle des pays développés, leurs écoles rurales ne font pas face à la problématique de leur fermeture par manque d’élèves, comme c’est le cas en France, au Canada ou aux États-Unis.
Au contraire, elles constituent une ressource fondamentale en Afrique sub-saharienne et en Chine, où elles ne peuvent compter que sur très peu de support pour accomplir leur mission. Le programme de l’état chinois pour les écoles rurales n’a été mis en place qu’en 1996. La promotion de l'éducation forcée dans les secteurs ruraux, qui a vu le jour la même année, est le plus grand projet éducatif lancé dans le pays depuis 1949, année où la nouvelle Chine fut fondée. Vers la fin de l’an 2000, la première phase du projet avait coûté 12,5 milliards de yuans (1,51 milliard de dollars américains), avait touché 852 des comtés dans 22 provinces et régions, et rejoint 255 millions de personnes[x].


[i] Corvalan, Javier (2003) Síntesis y análisis global de resultados por países, UNESCO, Chile. En http://www.unesco.cl/medios/biblioteca/documentos/estudio_poblacion_rural_lac_sintesis_analisis_paises.pdf

[ii] The National Telecommunications and Information Administration (NTIA) (1999) http://www.google.com/url?sa=X&start=9&oi=define&q=http://www.ntia.doc.gov/ntiahome/fttn99/glossary.html

[iii] UNESCO-FAO (2003) Education for rural development: towards new policy responses. Trouvé en: http://unesdoc.unesco.org/images/0013/001329/132994e.pdf

[iv] Statistics Canada, cite par Roach, Lorne (2000) “Aspects affecting small rural schools”. Faculty of Education. Memorial University of Newfoundland. Thesis for Master Degree. Canada.

[v] Rodríguez, Ernesto (1996) “Los desafíos de fin de siglo y la problemática juvenil rural en América Latina”. http://www.cholonautas.edu.pe/modulo/upload/Rodriguez.pdf .
Article de journal en: Comisión Económica para América Latina CEPAL, Juventud Rural: Modernidad y democracia en América Latina, Primera parte: la problemática de la juventud, cap. II, CEPAL, Santiago de Chile, 1996. pp. 35-54.

[vi] CRIÉE en http://www.ac-grenoble.fr/patrimoine-education/seminaire/criee.htm

[vii] L’École rurale. Dans la collection « Les manuels scolaires québécois ». Trouvé en : http://www.bibl.ulaval.ca/ress/manscol/revues/1904_1905ecole.html

[viii] Communauté de Recherche Interdisciplinaire sur l'Éducation et l'Enfance (2005) Musée de l’école rurale. Trouvé en http://www.museevirtuel.ca/pm.php?id=record_detail&fl=0&lg=Francais&ex=00000071

[ix] UNESCO-FAO (2003) Education for rural development: towards new policy responses. Trouvé en: http://unesdoc.unesco.org/images/0013/001329/132994e.pdf.%20p.59.

[x] People’s Daily (2002) China Expands Compulsory Education in Rural Areas. Article dans le journal trouvé en: http://www.china.org.cn/english/2002/May/32307.htm

Le survol sur l'école rurale


Définition opérationnel :
-Connu comme : école rurale, école de rang, école de village, école de proximité.
-Milieu rural. Changement du milieu rural. Signification culturelle.
-Sont partout : cinq continents, comment réponse au développement
-Relation avec l’administration centrale.
Caractéristiques générales :
-Petites écoles : nombre d’élèves, infrastructure.
-Multi-niveaux, classe unique.
-Des ressources
-Relation avec la communauté
-Transition au niveau secondaire

Les maîtres d’école rurale et leur travail :
-Formation
-Permanence
-Conditions de travail : solitude professionnelle, plus que maîtres,
-Les activités : organisation du travail, avec la communauté, relation avec les parents

Les élèves et leur environnement :
-La pauvreté
-Le transport
-La migration
-Le travail agricole
-La famille
Les résultats :
-L’échec scolaire
-La réussite
-L’école rurale, centre d’intérêt : UNESCO, Banque Mondiale, FAO, Communauté Européenne (CE)

L’école rurale, objet d’étude

Les recherches sur l’éducation rurale ont connu un développement important au cours des dix dernières années. La sociologie de l’éducation, les sciences de l’éducation et notamment la pédagogie, ont essentiellement contribué à cette production.
Comme il a été mentionné, les travaux sur l’école rurale s’inscrivent dans différents lieux à travers le monde. En France, par exemple, ces travaux ont été surtout menés par les organisations des maîtres d’école, les syndicats et les Universités. La plupart de ces travaux ont été recensés par l’Observatoire de l’école rurale. Aux États-Unis, on relève plusieurs recherches réalisées par différents organismes publics et privés réunis en consortium comme le Rural School and Community Trust (Ruraledu), la Organisation Concerned about rural education (OCRE), la National Rural Education Association (NREA). Au Canada, ces travaux ont été l’œuvre, essentiellement, d’une initiative gouvernementale, «le partenariat rural canadien».
Dans ces pays, l’école rurale en tant qu’objet de recherche a été principalement abordée selon deux points de vue, sociologique ou pédagogique.
L’approche sociologique a été privilégiée, entre autres, lors des études des conditions de travail des maîtres (snuipp, 2003), leur formation (Solano, 2003), de même que sur la critique de l'éducation centrée sur les inégalités scolaires, l'analyse comparée des politiques d'éducation et de formation professionnelle (Lange, 2001).

Les études portant sur la méthodologie propre à l’école rurale relèvent de l’approche pédagogique (par exemple, caractéristiques de la classe unique, efficacité de la classe multiniveaux).
Toutefois, en Amérique Latine et dans d’autres pays du tiers-monde, l’école rurale a été étudiée, principalement par les organismes internationaux tel l’UNESCO), en fonction de la mise en place des plans d’ajustement structurel : ceci a entraîné un glissement des travaux vers une approche plus économique et institutionnelle.
Les recherches récentes sur l’école rurale comme organisme fondamental du développement(FAO/UNESCO 2003), élargissent considérablement le champ des disciplines intéressées par ces sujets et renforcent l’interdisciplinarité. Elles ont permis de dépasser la seule dimension institutionnelle de l’étude des écoles pour davantage s’intéresser à sa dimension sociale et à son rôle comme agent de développement.
À partir de Jomtien (1990), de la déclaration d'une "Éducation pour tous", tous les efforts déployés par les gouvernements pour apporter le droit à l'éducation aux lieux les plus éloignés prennent une plus grande importance. Ces actions octroient à l'école rurale une assurance contre les tendances de fermeture qui persistent encore pour des raisons administratives dans plusieurs régions.
De bonnes raisons valables militent fortement en faveur du maintien des écoles rurales, peu importe leur situation géographique :
1. Elle est le centre de la communauté.
2. Elle remplit beaucoup de fonctions dans la communauté.
3. Elle fournit un sens d'identité.
4. Elle engendre de bons rapports entre les élèves et les enseignants, gages de réussite scolaire.
5. Elle dessert l’ensemble de la population indépendamment des croyances religieuses.

« L’école publique rurale continue de jouer un rôle essentiel comme service public de proximité, accessible sur tout le territoire. Elle contribue au droit à l’éducation et à plus de réussite pour tous. Pour le SNUipp (Syndicat national unitaire des instituteurs, enseignants des écoles et PEGC[1] en France) il est indispensable de conduire une politique d’aménagement du territoire qui réponde aux exigences de proximité et de qualité des populations, qu’il s’agisse des enseignements scolaires ou de l’accès à la culture »[i]

Dans la plupart des cas, l'école multiniveaux nous semble être la seule forme viable d'organisation scolaire dans l'environnement rural.
L'enseignement multiniveaux est présenté par ses défenseurs[ii], comme un outil pédagogique puissant pour favoriser l'étude indépendante et individuelle. Cette modalité d'étude semble avoir des grands avantages, puisque le programme d'enseignement peut être adapté aux besoins spécifiques de l'élève et contribuer ainsi à obtenir de meilleurs résultats.
L'école multiniveaux peut servir de laboratoire de recherche sur l'utilité de l'enseignement individualisé, puisque l'éducation personnalisée est une base qui favorise le travail multiniveaux. Pour certains chercheurs, la méthodologie qu’on peut développer dans la classe multiniveaux comporte beaucoup d’avantages[iii]. Ces écoles :
• développent rapidement le potentiel autodidacte de l’élève et avec beaucoup d’efficacité, à condition de bien choisir les stratégies d’apprentissage.
• développent chez les élèves indépendance et autonomie.
• développent une nouvelle expertise chez les enseignants, surtout chez ceux qui travaillent à deux niveaux.
• favorisent la motivation et la persévérance scolaire des élèves.
• permettent aux élèves de réussir aussi bien que dans des classes à un seul niveau d’enseignement.
• encouragent l’entraide entre les élèves.

Un élément positif de l’enseignement multiniveaux est l’implication de la communauté dans la fourniture des équipements. Cependant, il faut prendre en compte que les équipements ne peuvent que refléter la richesse ou la pauvreté des communautés. Par conséquent, si des conditions inéquitables sont reconnues et se doivent d’être éliminées, le gouvernement doit intervenir et appliquer une politique d’équité d’accès aux ressources.
Une mise en œuvre efficace de l’enseignement multiniveaux nécessite aussi l’établissement de mécanismes de contrôles réguliers, de suivi et de soutien aux niveaux région/district et enseignant/classe. Elle nécessite des structures de soutien et la définition de standards minimaux et de critères selon lesquels les résultats des élèves seront évalués.
Beaucoup sont d’avis que les programmes d’entretien et d’acquisitions de l’équipement des écoles rurales doivent répondre à quelques normes minimales.[iv]., afin de s’assurer que les bâtiments scolaires soient sûrs, sains et en nombre suffisant.
Pour améliorer l’infrastructure des écoles rurales, on se doit d’établir des priorités basées sur une évaluation fiable et précise des besoins de l’école. Afin d’amener les gens de la communauté à participer à la gestion de leur école et dans sa planification, il est nécessaire de s’en remettre à eux, lorsque c’est possible, quand vient le temps de procéder à l’acquisition des biens considérés prioritaires.
Les ressources financières allouées doivent être suffisamment élevées pour couvrir non seulement la construction de nouvelles écoles, mais aussi les coûts de rénovation, de réparation et d’entretien des écoles existantes.
Le processus d’approbation des projets d’acquisition d’équipement doit être flexible et doit prévoir des mécanismes rapides de prises de décisions pour faire face à des situations urgentes, où là santé, la sécurité et les études des élèves sont en jeu.
Les priorités pour le financement des écoles doit tenir compte de la richesse relative de certaines zones. Ce financement doit minimalement répondre aux besoins les plus criants des écoles rurales.
Les programmes d’acquisition d’équipement doivent permettre aux écoles rurales de s’équiper adéquatement pour satisfaire les besoins technologiques des élèves et des enseignants. Plus particulièrement, quelques auteurs font même référence à la possibilité d’utiliser les technologies de l’information et des communications (NTIC) pour amoindrir l’isolement de ces écoles.

Malgré ces idées, beaucoup de parents favorisent la fermeture d’une école, dans une région donnée, plutôt que de maintenir une salle de classe multiniveaux. Mulcahy[v] précise que l'existence de la salle de classe multiniveaux ou la menace de devoir la créer a été employée pour convaincre des parents d’appuyer l'élimination de l’école dans leur communauté. On a dit aux parents que l'éducation multiniveaux était une forme inférieure et périmée d'instruire. S'ils s'inquiétaient vraiment de l'éducation de leurs enfants, ils devraient accepter le transfert de leurs enfants dans une autre communauté possédant une plus grande école où on dispense l’enseignement dans des classes à niveau unique.
[1] Professeur d'enseignement général de collège.
[i] Caye, Christian (2002) “Le SNUipp et le fonctionnement des écoles” Article de journal en SNUIPP’89. France. Trouvé en : http://89.snuipp.fr/article.php3?id_article=156&var_recherche=rural

[ii] Collot (2005) La pédagogie de la mouche. France. Trouvé en : http://perso.wanadoo.fr/b.collot/b.collot/mouche.htm

[iii] Collot (2005) La pédagogie de la mouche. France. Trouvé en : http://perso.wanadoo.fr/b.collot/b.collot/mouche.htm

[iv] McColl, Ann and Malhoit, Gregory C. (2004) Rural School Facilities: State Policies that Provide Students with an Environment to Promote Learning. Rural School and Community Trust. USA. Trouvé en: http://www.ruraledu.org/docs/rural_school_facilities_policies.pdf

[v] Mulcahy, D. (1996) “Why rural education?” Cité par Roach, Lorne (2000) “Aspects affecting small rural schools”. Faculty of Education. Memorial University of Newfoundland. Thesis for Master Degree. Canada.

L'école rurale et l'étude des organisations




L’étude des organisations est née avec la croissance des grandes organisations de la société industrielle. Partie de la bureaucratie, elle est passée à l'observation des acteurs et de leurs stratégies, pour en venir à ce qui fait tenir ensemble individus et groupes dans les organisations. Une des organisations qui a été étudiée a partir des différentes théories des organisations est l’école. Mais, jusqu'au présent on n’a pas trouvé une approche qui permet étudier l’école rurale en tant qu’organisation. Les études recensées sur l’école rurale traitent principalement de sa dimension géographique ou pédagogique.


On pourrait faire un essai de définition de l’école rural ainsi :
Si l'on envisage l'organisation comme un ensemble caractérisé par une action organisée ou collective nécessitant une coopération entre plusieurs personnes qui cherchent à atteindre, ensemble, un objectif, alors on peut considérer l'école rurale comme une organisation. En tant que telle, elle a un ou des buts (la réussite scolaire des enfants de la communauté rurale), des membres qui la composent (des acteurs, c'est-à-dire les parents, les élèves, les membres de la communauté, les enseignants), une division et une coordination minimale des tâches (très minimale parce que les tâches de gestion et les tâches pédagogiques sont la responsabilité de l’enseignant unique) et une certaine stabilité.


De plus, une école rurale n'est pas un système clos : sa capacité à atteindre ses objectifs est liée à son insertion dans un système plus global qu'il soit local, national ou international ; le modèle de la contingence montre qu'une structure n'est efficace que dans une situation déterminée qui dépend des caractéristiques propres à l'organisation et à son environnement.



1. Comment définir l'environnement de l'école rurale?
L'école rurale se trouve aujourd'hui placée au cœur d'une série de tensions, entendues comme un ensemble de forces parfois contradictoires : entre les niveaux local, national et transnational, entre les traditions héritées du passé et les exigences de la modernité, entre les exigences de modernisation et de changements et les pratiques ordinaires dans les établissements.

Le modèle de la contingence affirme que les organisations qui opèrent dans un environnement complexe et instable peuvent se doter utilement d'un système organique. Et l’école rurale a probablement survécue dans toutes les sociétés grâce a sa conformation organique. L'environnement de l'école rurale devient, on le voit, de plus en plus complexe et mouvant et présente un certain nombre de contraintes. Dans ce type d'environnement l'école ne peut plus gérer son fonctionnement de façon mécaniste :
- la centralisation des décisions devient incompatible avec les nouvelles tendances de décentralisation.
- les procédures et règles entraînent des rigidités qui empêchent l'adaptation et le changement nécessaires de curriculum, des horaires, etc.
- la division du travail est presque impossible.
Dans ces conditions, les enseignants semblent avoir un rôle particulier et prépondérant. Il s'agit en effet de passer d'un fonctionnement formel à un fonctionnement participatif, bref de faire évoluer les tâches de management qui lui sont imposées et qui semblent de plus en plus à celles d'un manager, vers une façon de gérer la petite école rurale au regard des caractéristiques du management post-industriel, qui pourraient être transposables dans le système éducatif :
- simplification des structures et souplesse des procédures
- autonomie des unités opérationnelles (écoles rurales)
- management participatif basé sur la consultation et sur la délégation.
2. Pour expliquer l’école en soi, comme organisation, on pourrait se servir des cadres développés par Bolman & Deal qui proposent aux leaders des organisations, lors de la prise de décision, de regarder leurs organisations à travers différents cadres possibles : le cadre structurel, le cadre de ressources humaines, le cadre politique et le cadre symbolique. Pour eux toute tentative de compréhension de comportements organisationnels ou de recherche de solutions aux problèmes de gestion par le biais d’une seule approche, prise à part, sont considérées comme réductionnistes.

Bolman et Deal (1984) voient dans la diversité des visions, qu’ils classifient en quatre cadres (“frames”), une sorte de “ pluralisme conceptuel” nécessaire pour comprendre, centrer et organiser le comportement organisationnel :
Le cadre structurel envisage l’organisation à partir de sa structure. Cette dernière fonctionne comme un plan d’architecture et on doit regarder la coordination des éléments de façon verticale et horizontale. En regardant cette coordination on peut comparer la structure organisationnelle de l’école rurale avec des modèles déjà existants : les types d’organisation selon Mintzberg (la bureaucratie professionnelle). Aussi, on peut la comparer avec la toile d’inclusion d’Heglsen qui souligne l’absence d’hiérarchie verticale entre les acteurs.
Le cadre de Ressources Humaines fait référence aux cadres théoriques qui expliquent le comportement humain : Maslow (hiérarchie des besoins humains), MacGregor (Théorie X et Y), Argyris (ajustement des besoins de l’organisation avec ceux de l’individu). Ce cadre parle de la nécessité des stratégies bien organisées en matière des ressources humaines pour la réussite d’une organisation.
Le cadre politique parle de la nécessité des négociations et de la capacité de réussir. Les concepts de pouvoir, d’autorité, des alliances, de contrôle, par exemple, déterminent bien les enjeux relatifs au cadre politique. Le conflit est un autre concept important, en entendant par là qu’il n’est pas nécessairement négatif pour l’organisation.

Le cadre symbolique parle de l’importance des représentations pour les individus et pour les organisations. Il y a beaucoup des symboles organisationnels comme les mythes, les légendes, les rituels, les cérémonies. Toutes ces représentations définissent la culture de l’organisation.


Il faut cependant prendre garde à une transposition directe des modèles de management car si l'entreprise fournit un éclairage intéressant, l'élève n'est pas un produit, la situation dans les écoles rurales réclame une approche spécifique. La " production " d’une école rurale n'est pas un bien, ni un service simple, mais une ensemble de service qui bénéfice à toute la communauté. A culture et produit différents, management différent. Il ne faut pas en effet oublier les finalités humanistes de l'institution scolaire comme valeurs centrales de sa culture : le concept de management éducatif trouve ici sa pertinence. L’enseignant de l’école rurale dans son rôle de leader d'établissement, doit passer de la direction, qui consiste à diriger de manière formelle et autoritaire en s’appuyant sur le pouvoir hiérarchique, au management où il devient responsable d'une mission collective. Il se trouve à la croisée du management participatif et du management par les valeurs culturelles du milieu.
Alors, à la lumière des courants théoriques de l’étude des organisations, on se pose les questions suivantes :
Est-ce qu’une approche éclectique permettrait d’arriver à une définition claire de l’école rurale en tant qu’organisation?
Est-ce que en essayant de définir l’école rurale en tant qu’organisation on peut améliorer la connaissance de sa multifonctionnalité ? C’est-à-dire, examiner en quoi diverses approches théoriques peuvent-ils contribuer à renforcer le travail de l’école rurale? Par exemple, il serait intéressant de se demander si et comment les écoles rurales qui ne s’affichent pas multifonctionnalistes dans le débat public sont –dans la pratique- multifonctionnelles.