lundi, décembre 18, 2006

L’école rurale, objet d’étude

Les recherches sur l’éducation rurale ont connu un développement important au cours des dix dernières années. La sociologie de l’éducation, les sciences de l’éducation et notamment la pédagogie, ont essentiellement contribué à cette production.
Comme il a été mentionné, les travaux sur l’école rurale s’inscrivent dans différents lieux à travers le monde. En France, par exemple, ces travaux ont été surtout menés par les organisations des maîtres d’école, les syndicats et les Universités. La plupart de ces travaux ont été recensés par l’Observatoire de l’école rurale. Aux États-Unis, on relève plusieurs recherches réalisées par différents organismes publics et privés réunis en consortium comme le Rural School and Community Trust (Ruraledu), la Organisation Concerned about rural education (OCRE), la National Rural Education Association (NREA). Au Canada, ces travaux ont été l’œuvre, essentiellement, d’une initiative gouvernementale, «le partenariat rural canadien».
Dans ces pays, l’école rurale en tant qu’objet de recherche a été principalement abordée selon deux points de vue, sociologique ou pédagogique.
L’approche sociologique a été privilégiée, entre autres, lors des études des conditions de travail des maîtres (snuipp, 2003), leur formation (Solano, 2003), de même que sur la critique de l'éducation centrée sur les inégalités scolaires, l'analyse comparée des politiques d'éducation et de formation professionnelle (Lange, 2001).

Les études portant sur la méthodologie propre à l’école rurale relèvent de l’approche pédagogique (par exemple, caractéristiques de la classe unique, efficacité de la classe multiniveaux).
Toutefois, en Amérique Latine et dans d’autres pays du tiers-monde, l’école rurale a été étudiée, principalement par les organismes internationaux tel l’UNESCO), en fonction de la mise en place des plans d’ajustement structurel : ceci a entraîné un glissement des travaux vers une approche plus économique et institutionnelle.
Les recherches récentes sur l’école rurale comme organisme fondamental du développement(FAO/UNESCO 2003), élargissent considérablement le champ des disciplines intéressées par ces sujets et renforcent l’interdisciplinarité. Elles ont permis de dépasser la seule dimension institutionnelle de l’étude des écoles pour davantage s’intéresser à sa dimension sociale et à son rôle comme agent de développement.
À partir de Jomtien (1990), de la déclaration d'une "Éducation pour tous", tous les efforts déployés par les gouvernements pour apporter le droit à l'éducation aux lieux les plus éloignés prennent une plus grande importance. Ces actions octroient à l'école rurale une assurance contre les tendances de fermeture qui persistent encore pour des raisons administratives dans plusieurs régions.
De bonnes raisons valables militent fortement en faveur du maintien des écoles rurales, peu importe leur situation géographique :
1. Elle est le centre de la communauté.
2. Elle remplit beaucoup de fonctions dans la communauté.
3. Elle fournit un sens d'identité.
4. Elle engendre de bons rapports entre les élèves et les enseignants, gages de réussite scolaire.
5. Elle dessert l’ensemble de la population indépendamment des croyances religieuses.

« L’école publique rurale continue de jouer un rôle essentiel comme service public de proximité, accessible sur tout le territoire. Elle contribue au droit à l’éducation et à plus de réussite pour tous. Pour le SNUipp (Syndicat national unitaire des instituteurs, enseignants des écoles et PEGC[1] en France) il est indispensable de conduire une politique d’aménagement du territoire qui réponde aux exigences de proximité et de qualité des populations, qu’il s’agisse des enseignements scolaires ou de l’accès à la culture »[i]

Dans la plupart des cas, l'école multiniveaux nous semble être la seule forme viable d'organisation scolaire dans l'environnement rural.
L'enseignement multiniveaux est présenté par ses défenseurs[ii], comme un outil pédagogique puissant pour favoriser l'étude indépendante et individuelle. Cette modalité d'étude semble avoir des grands avantages, puisque le programme d'enseignement peut être adapté aux besoins spécifiques de l'élève et contribuer ainsi à obtenir de meilleurs résultats.
L'école multiniveaux peut servir de laboratoire de recherche sur l'utilité de l'enseignement individualisé, puisque l'éducation personnalisée est une base qui favorise le travail multiniveaux. Pour certains chercheurs, la méthodologie qu’on peut développer dans la classe multiniveaux comporte beaucoup d’avantages[iii]. Ces écoles :
• développent rapidement le potentiel autodidacte de l’élève et avec beaucoup d’efficacité, à condition de bien choisir les stratégies d’apprentissage.
• développent chez les élèves indépendance et autonomie.
• développent une nouvelle expertise chez les enseignants, surtout chez ceux qui travaillent à deux niveaux.
• favorisent la motivation et la persévérance scolaire des élèves.
• permettent aux élèves de réussir aussi bien que dans des classes à un seul niveau d’enseignement.
• encouragent l’entraide entre les élèves.

Un élément positif de l’enseignement multiniveaux est l’implication de la communauté dans la fourniture des équipements. Cependant, il faut prendre en compte que les équipements ne peuvent que refléter la richesse ou la pauvreté des communautés. Par conséquent, si des conditions inéquitables sont reconnues et se doivent d’être éliminées, le gouvernement doit intervenir et appliquer une politique d’équité d’accès aux ressources.
Une mise en œuvre efficace de l’enseignement multiniveaux nécessite aussi l’établissement de mécanismes de contrôles réguliers, de suivi et de soutien aux niveaux région/district et enseignant/classe. Elle nécessite des structures de soutien et la définition de standards minimaux et de critères selon lesquels les résultats des élèves seront évalués.
Beaucoup sont d’avis que les programmes d’entretien et d’acquisitions de l’équipement des écoles rurales doivent répondre à quelques normes minimales.[iv]., afin de s’assurer que les bâtiments scolaires soient sûrs, sains et en nombre suffisant.
Pour améliorer l’infrastructure des écoles rurales, on se doit d’établir des priorités basées sur une évaluation fiable et précise des besoins de l’école. Afin d’amener les gens de la communauté à participer à la gestion de leur école et dans sa planification, il est nécessaire de s’en remettre à eux, lorsque c’est possible, quand vient le temps de procéder à l’acquisition des biens considérés prioritaires.
Les ressources financières allouées doivent être suffisamment élevées pour couvrir non seulement la construction de nouvelles écoles, mais aussi les coûts de rénovation, de réparation et d’entretien des écoles existantes.
Le processus d’approbation des projets d’acquisition d’équipement doit être flexible et doit prévoir des mécanismes rapides de prises de décisions pour faire face à des situations urgentes, où là santé, la sécurité et les études des élèves sont en jeu.
Les priorités pour le financement des écoles doit tenir compte de la richesse relative de certaines zones. Ce financement doit minimalement répondre aux besoins les plus criants des écoles rurales.
Les programmes d’acquisition d’équipement doivent permettre aux écoles rurales de s’équiper adéquatement pour satisfaire les besoins technologiques des élèves et des enseignants. Plus particulièrement, quelques auteurs font même référence à la possibilité d’utiliser les technologies de l’information et des communications (NTIC) pour amoindrir l’isolement de ces écoles.

Malgré ces idées, beaucoup de parents favorisent la fermeture d’une école, dans une région donnée, plutôt que de maintenir une salle de classe multiniveaux. Mulcahy[v] précise que l'existence de la salle de classe multiniveaux ou la menace de devoir la créer a été employée pour convaincre des parents d’appuyer l'élimination de l’école dans leur communauté. On a dit aux parents que l'éducation multiniveaux était une forme inférieure et périmée d'instruire. S'ils s'inquiétaient vraiment de l'éducation de leurs enfants, ils devraient accepter le transfert de leurs enfants dans une autre communauté possédant une plus grande école où on dispense l’enseignement dans des classes à niveau unique.
[1] Professeur d'enseignement général de collège.
[i] Caye, Christian (2002) “Le SNUipp et le fonctionnement des écoles” Article de journal en SNUIPP’89. France. Trouvé en : http://89.snuipp.fr/article.php3?id_article=156&var_recherche=rural

[ii] Collot (2005) La pédagogie de la mouche. France. Trouvé en : http://perso.wanadoo.fr/b.collot/b.collot/mouche.htm

[iii] Collot (2005) La pédagogie de la mouche. France. Trouvé en : http://perso.wanadoo.fr/b.collot/b.collot/mouche.htm

[iv] McColl, Ann and Malhoit, Gregory C. (2004) Rural School Facilities: State Policies that Provide Students with an Environment to Promote Learning. Rural School and Community Trust. USA. Trouvé en: http://www.ruraledu.org/docs/rural_school_facilities_policies.pdf

[v] Mulcahy, D. (1996) “Why rural education?” Cité par Roach, Lorne (2000) “Aspects affecting small rural schools”. Faculty of Education. Memorial University of Newfoundland. Thesis for Master Degree. Canada.